Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Pascale Got

Réunion du 16 juin 2009 à 15h00
Développement et modernisation des services touristiques — Question préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPascale Got :

D'abord, il reste une constante ambiguïté entre modernisation affichée et recherche d'économies, dont je donnerai deux exemples.

Le premier porte sur le regroupement en un seul organisme d'ODIT France et de Maison de la France. N'est-il vraiment réalisé que dans un seul but d'unicité d'action ? Permettez-moi d'en douter ! Nous avons là tous les critères d'une réforme de type RGPP consistant d'abord à rechercher des économies, en s'abritant derrière une façade d'efficacité. La mutualisation annoncée des moyens est-elle un outil ou une excuse ?

Ces interrogations sont légitimes, monsieur le secrétaire d'État. De nombreux professionnels auditionnés mais également l'Association des maires de France sont restés sur leur faim quant à la clarté de la gouvernance, des ambitions, des missions et de l'ingénierie touristique de la nouvelle agence.

Loin de moi l'idée de vous faire un procès d'intention a priori, mais convenez que le fait de démarrer dans une telle opacité de moyens et de stratégie, légitime les inquiétudes des professionnels et donc les nôtres.

En réalité, et vous le savez bien monsieur le secrétaire d'État, seuls les moyens financiers que vous consacrerez à l'agence Atout France afficheront réellement votre volonté de résultats et répondront à ces questions. Or dans le contexte actuel et au regard de la dernière loi de finances, on est en droit de s'inquiéter.

Le deuxième exemple illustrant toujours cette même ambiguïté porte sur la procédure du classement hôtelier. Jusqu'à présent, le préfet attribuait le classement après un avis de la commission départementale d'action touristique fondé sur un rapport de visite effectué par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes.

Désormais les visites ne seront plus effectuées par les services de l'État mais par des organismes privés. Certes, ces derniers seront accrédités par le Comité français d'accréditation, mais ils seront néanmoins privés donc payants. Ainsi, sous couvert de modernisation, l'État se désengage de cette charge d'évaluation. Il en fait payer le coût à l'établissement demandeur. Si ce n'est pas une recherche d'économies, ça y ressemble quand même beaucoup !

Ce texte, monsieur le secrétaire d'État, ne soulève pas que des ambiguïtés. Il interroge aussi sur la volonté réelle du Gouvernement de traiter dans sa globalité l'un des premiers secteurs économiques français.

Des pans entiers de problématiques du tourisme ne sont pas abordés. Je pense à la petite hôtellerie indépendante et saisonnière qui connaît de plus en plus de difficultés. Je pense au statut, aux conditions de travail et d'hébergement des saisonniers dont on ne parle pas ou peu. Je pense au tourisme social qui se trouve en quête d'identité : il faut gérer son héritage et tenir compte de son évolution en redéfinissant des objectifs et des moyens d'intervention, dans le cadre d'une démarche qualité. Je pense à l'insuffisance de l'offre d'hébergement pour le tourisme solidaire, familial, jeune et associatif. Je pense, enfin, au manque de réflexion sur l'accessibilité des régions touristiques en terme d'infrastructures et de service de transport.

À défaut de réel engagement de l'État, ce sont encore une fois les collectivités territoriales et leurs prolongements – offices du tourisme, comités départementaux et régionaux du tourisme – qui devront assumer la stratégie et les investissements en matière d'accueil de tourisme à vocation sociale.

Monsieur le secrétaire d'État, le tourisme est aussi un élément d'aménagement du territoire, ou bien de destruction lorsque les intérêts marchands l'emportent sur la protection et la valorisation du patrimoine environnemental. Sur ce plan aussi, le projet de loi aurait pu marquer une volonté du Gouvernement de soutenir un tourisme alternatif, respectueux de l'environnement et des populations. Nous le savons tous, le tourisme n'est pas seulement affaire de classement hôtelier, de pouvoir d'attraction international ou de toilettage d'une réglementation obsolète. Il a aussi une dimension sociale, humaine et environnementale.

J'ai déjà eu l'occasion de vous le dire, monsieur le secrétaire d'État, ce texte est bigrement minimaliste au regard des enjeux et des problématiques du tourisme français. Pourquoi ? Parce que l'organisation mondiale du tourisme prévoit que les flux touristiques vont tripler sur le plan international et doubler en Europe, au cours des vingt prochaines années.

Votre projet de loi reste aussi trop partiel : il favorise une partie des professionnels du tourisme ; il fait l'impasse sur de nombreuses problématiques ; il ne s'adresse pas suffisamment aux plus défavorisés.

C'est donc un texte ambigu et minimaliste qui relègue, une fois de plus, le tourisme au rang d'activité secondaire. Or les perspectives d'évolution de ce secteur ne doivent pas simplement prolonger les tendances des dernières années.

Surtout, monsieur le secrétaire d'État, c'est un texte alibi. Un de plus ! Vous vous en servez pour faire passer, au dernier moment, par le biais d'amendements du Gouvernement, de nouvelles dispositions, plus ou moins liées au texte initial. Loin d'être neutres financièrement et socialement, ces dispositions illustrent, une fois de plus, votre sempiternelle ligne de flottaison douteuse entre secteur privé et secteur public, et elles nous engagent sans grande concertation préalable.

Ainsi l'article 13 ter prévoit que le financement de stades privés est désormais d'intérêt général, ce qui surprend, y compris dans les rangs de la majorité. Que fait cet article dans ce texte ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Mais je souhaite mettre surtout l'accent sur un autre amendement du Gouvernement : l'article 10 bis A qui accélère, dans la précipitation, la mise en place de la TVA à 5,5 % pour la restauration, alors que cette disposition était initialement prévue pour janvier 2010.

Selon vos propres estimations, le coût de cette mesure s'élèvera à trois milliards d'euros en année pleine. En enlevant les allégements de charges qui seront supprimés au 1er juillet, le coût pour les finances publiques sera au minimum de l'ordre de 2,5 milliards d'euros chaque année.

Vous conviendrez avec moi, que 2,5 milliards d'euros de suppression de recettes fiscales, c'est considérable, surtout si l'on tient compte de la situation désastreuse de nos finances publiques. Le ministère de l'économie avait préconisé avec sagesse un taux compris entre 10 et 12 %.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion