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Intervention de Nicolas Dupont-Aignan

Réunion du 15 janvier 2008 à 9h30
Article 11 de la constitution — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicolas Dupont-Aignan :

Mais celui-ci n'avait rien à voir avec le traité de Lisbonne. Toute l'ambiguïté, que je crois malheureusement très calculée, est venue de là.

Un deuxième point m'incite à voter cette proposition de loi : c'est la première fois depuis la Libération que le Parlement est amené à voter une révision constitutionnelle entraînant des conséquences aussi lourdes sur le fonctionnement des pouvoirs publics et l'organisation de notre démocratie. Soyons clairs : si on lit attentivement ce traité de Lisbonne, qui reprend les principales dispositions de la Constitution Giscard, c'est un changement de régime qui s'annonce, et c'est la fin de notre souveraineté nationale. Avec le passage à la majorité qualifiée de la procédure de vote dans cinquante-deux domaines d'une importance considérable, nous nous dépossédons du pouvoir législatif, en échange d'un pouvoir de pétition, que l'on nous accorde comme par charité et dont certains se gargarisent dans cet hémicycle. Bien évidemment, ces deux pouvoirs sont sans commune mesure.

Je citerai pour seul exemple le cas des négociations à l'OMC, déterminantes pour les délocalisations. Un matin, le Président de la République nous réunit à l'Élysée pour nous annoncer qu'il opposera son veto si M. Mandelson trahit les intérêts français ; mais, un après-midi de juin 2007, il signe le traité de Bruxelles qui supprime le droit de veto pour les négociations commerciales internationales. Qu'on m'explique comment nous pourrions mener une politique indépendante et redresser le pays si nous nous privons de tous les instruments qui permettent à la France de faire valoir son point de vue dans les grandes négociations internationales !

Je pourrais aussi évoquer les fameuses clauses passerelles, sans précédent, qui nous obligent à abandonner le pouvoir constituant. Vous savez en effet que, si les vingt-sept chefs d'État se mettaient d'accord pour modifier le traité de Lisbonne, de Maastricht ou de Nice, il n'y aurait pas, pour la première fois dans l'histoire de la République, de ratification parlementaire ni référendaire. L'Assemblée abandonnerait ainsi son pouvoir constituant dans des domaines fondamentaux, du fait de ces clauses passerelles, évidemment présentées de manière fort discrètes.

Enfin, notre politique étrangère et de défense va se trouver encadrée. La sujétion de la future politique européenne de défense à l'OTAN, qui est évidemment gravissime, interdit l'Europe indépendante que vous prétendez construire.

Je conclurai par des questions très simples.

Comment pouvez-vous imaginer réconcilier les Français avec la politique, alors même que vous organisez dans leur dos le vote d'un projet constitutionnel qui les dépossédera des moyens de mettre en application les politiques promises lors des campagnes présidentielles ou législatives ? Quel que soit le groupe politique auquel nous appartenons, nous sommes un certain nombre à lutter contre cette dépossession.

Comment le Président de la République pourra-t-il mettre en oeuvre ses réformes avec un euro à un dollar cinquante, sachant que le traité ne contient aucune disposition sur la réforme de la BCE ? Comment pourra-t-il appliquer sa nouvelle politique économique, alors que les délocalisations s'accentuent, s'il abandonne le droit de veto sur l'OMC ? Comment, madame Ameline, pourrons-nous instaurer cette Europe qui protège et qui s'affirme, alors que le traité ligote les peuples et donne tous les pouvoirs à des organismes non élus : la Commission de Bruxelles, la Banque centrale européenne et la Cour de justice des Communautés européennes ? Si l'on m'explique un jour comment la France pourra se redresser en abandonnant à des organismes non élus tous les pouvoirs dont elle dispose à Bruxelles, j'en serai heureux.

Je ne vois pas comment on peut construire l'Europe en se défiant des peuples. Comment ceux-ci pourraient-ils l'aimer et la respecter si l'on se méfie d'eux et que l'on fait voter à la va-vite un texte absolument scélérat, dont l'adoption restera une triste date pour la France ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et sur de nombreux bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

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