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Intervention de Françoise Guégot

Réunion du 4 décembre 2008 à 9h15
Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançoise Guégot, rapporteure :

Notre mission d'information a été créée par la commission le 13 mai dernier afin d'engager une réflexion sur la réforme de la formation professionnelle, considérée comme prioritaire.

Réunie pour la première fois le 4 juin, la mission a procédé à 21 auditions et organisé une table ronde réunissant des responsables d'entreprises de tailles différentes et de secteurs divers. Elle a tenu ensuite, au cours de huit réunions de travail, un débat interne sur les orientations du rapport.

Lors de notre première réunion, nous avons considéré qu'il fallait élargir le champ de notre réflexion et de nos travaux aux enjeux de citoyenneté, de promotion sociale et de croissance économique que portent en elles les formations initiales et les formations qualifiantes et diplômantes. Nous avons posé comme objectif la nécessité de garantir à chacun de nos concitoyens, tout au long de la vie, une formation d'une qualité et d'une efficacité telles qu'elle garantisse la sécurisation des parcours professionnels dans un monde en mutation permanente.

Chacun le constate au quotidien, la formation est un chantier prioritaire répondant à des besoins économiques et sociaux permanents qui revêtent une acuité particulière dans la période de crise que nous connaissons.

Cet objectif d'une véritable formation tout au long de la vie nous a conduits à rechercher comment créer des liens et des passerelles entre la formation initiale et la formation professionnelle, afin de permettre des allers-retours de l'une à l'autre tout au long de la vie. Comment enrichir les parcours professionnels par des formations qualifiantes et diplômantes. Comment placer la personne, quels que soient son âge et son statut, au centre du système de formation afin de sécuriser au mieux son parcours professionnel ou personnel ? Notre système doit être plus juste pour réduire les inégalités à la sortie de la formation initiale.

De nombreux rapports ont été rédigés sur ce sujet. Nous nous sommes particulièrement appuyés sur ceux qui ont été publiés depuis deux ans. Une synthèse des propositions de neuf de ces documents sera annexée au rapport de la mission, de même qu'une synthèse des interventions des personnes que nous avons auditionnées.

Le rapport ne revient pas sur un état des lieux déjà clairement établi dans nombre des travaux évoqués, parmi lesquels, en juillet 2007, le rapport de la mission d'information sénatoriale que présidait M. Jean-Claude Carle et dont M. Bernard Seillier était le rapporteur. En revanche, nous avons mis en évidence des points de convergence émanant tant des rapports précités que de nos auditions pour relever les défauts et blocages du système actuel, et pour proposer divers moyens de le rendre réellement dynamique, et capable d'entrer en phase avec les mutations du temps présent.

S'agissant des défauts et blocages du système actuel, le rapport souligne d'abord les résultats contestés de la formation initiale, qui ne remplit pas de façon satisfaisante sa mission républicaine. Ainsi l'école ne prévient pas les échecs ; les formations professionnelles initiales sont loin de donner des résultats suffisants ; un nombre important de jeunes sortent encore du système scolaire sans diplôme ; l'enseignement supérieur ne propose ni assez de places ni des formations assez diversifiées et les abandons y sont beaucoup trop importants. Il faut poursuivre avec détermination la réforme actuellement lancée à ce niveau.

En outre, la formation initiale ne permet pas d'établir de véritables liens avec le monde économique. Une séparation existe entre l'Éducation nationale et le monde du travail ; par conséquent, du collège à l'université, les professeurs ne s'impliquent pas vraiment dans un accompagnement de leurs élèves vers une insertion professionnelle.

La formation tout au long de la vie souffre également de la défaillance des services d'orientation, dès l'école et jusqu'à l'université. Une certaine évolution est en cours. La loi du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités a étendu leurs missions à l'orientation et à l'insertion professionnelle. Dans chaque université un bureau d'aide à l'insertion professionnelle des étudiants va être créé. Mais globalement on assiste à une orientation par l'échec ou par défaut, qui tend plutôt à la reproduction des catégories socioprofessionnelles et ne prend pas en compte les aptitudes.

Le système de formation professionnelle perpétue ces inégalités et même les accentue puisque les salariés y accèdent d'autant moins que leur niveau de formation de base est faible.

L'offre de formation est opaque et sa qualité n'est pas garantie. Elle est compartimentée en fonction de filières et de certifications beaucoup trop nombreuses, et, partant, de spécialisations trop étroites, qui constituent un frein à une mobilité pourtant inévitable désormais. Qui plus est, ni la politique de formation tout au long de la vie ni l'offre de formation ne font pas l'objet d'une évaluation digne de ce nom.

Les financements sont abondants mais dispersés et ils ne sont pas intégralement réservés à la formation professionnelle puisqu'un pourcentage de la collecte finance la démocratie sociale.

Enfin, la gouvernance est mal définie : l'État ne joue pas le rôle qui lui revient de fixer les objectifs de la politique de la formation tout au long de la vie ; les régions ne jouent pas non plus toujours efficacement leur rôle de coordination de la politique régionale.

Les propositions de la mission d'information sont destinées à dynamiser la démarche de formation tout au long de la vie. Seize propositions s'organisent autour de quatre thèmes : construire un véritable dispositif de formation tout au long de la vie, contrôler et évaluer l'offre de formation, clarifier la gouvernance, simplifier les financements.

Pour construire un dispositif de formation tout au long de la vie, nous proposons :

– de mettre en place un véritable service public d'information sur la formation et l'orientation (le SPIFO) visant une information claire ; ce service aurait pour premières tâches la création d'un portail Internet et d'un centre d'accueil, de documentation et d'unification ou de mise en réseau des multiples organismes existants ;

– d'assurer aux enseignants une meilleure connaissance de l'emploi, du monde du travail, de l'entreprise et des différents milieux professionnels tant dans le cadre de leur formation initiale que par des formations continues régulières et des obligations de stages en entreprise tout au long de la carrière ;

– de rendre obligatoire, dès la classe de 5e, des enseignements permettant de découvrir les familles de métiers et les modalités de fonctionnement des entreprises ;

– de créer un passeport orientationformation pour chaque élève, dès la classe de 5e, afin de valider, aux différentes étapes du parcours scolaire, les choix d'orientation et, à terme, les choix de formation aux métiers ;

– de créer un certificat des acquis pour les élèves quittant le système éducatif sans diplôme ;

– de simplifier les qualifications figurant sur le répertoire des références métiers de l'ANPE, dit base ROME, de créer des modules communs pour certains troncs de qualification, d'assurer une offre plus lisible et plus cohérente des diplômes et des certifications professionnelles, par la mise en place d'une véritable gestion paritaire de la création et de la révision des titres.

Le contrôle et l'évaluation de l'offre de formation est également une question essentielle. Nous proposons :

– de créer un Observatoire national de l'offre de formation ;

– de recenser toute l'offre de formation et de la publier sur Internet au sein d'une base de données accessible à tous ;

– de créer une procédure de labellisation des organismes de formation, y compris privés, qui s'appuierait sur l'Office professionnel de qualification des organismes de formation, l'OPQF, qui a déjà entrepris ce travail.

Par ailleurs, pour optimiser l'efficacité de la formation professionnelle au profit de l'entreprise et de l'employé, nous proposons :

– de créer un outil de suivi des formations accomplies dans l'entreprise, que ce soit au titre du plan de formation ou au titre d'actions diplômantes et qualifiantes. Ce « carnet de bord personnalisé de la formation » devra permettre de mettre en regard des droits à formation différée que tout salarié aura accumulés les formations qu'il aura effectivement pu suivre ;

– d'instaurer, en prolongement de ce carnet de bord, la transférabilité totale du droit individuel à la formation (DIF) et d'instituer un compte épargne-formation. Ainsi, le salarié pourra être pleinement actif dans sa dynamique de sécurisation de son parcours professionnel ;

– de simplifier la procédure de validation des acquis professionnels – VAE. Cette proposition s'appuie sur le rapport remis au Parlement par le secrétaire d'État chargé de la prospective et de l'évaluation des politiques publiques, Éric Besson. Il s'agit, pour éviter l'évaporation importante des candidats au cours du processus, de réduire sa durée, d'améliorer le fonctionnement des jurys et de parfaire l'accompagnement des candidats. La VAE est évidemment un pilier de la continuité du parcours professionnel.

S'agissant du financement de la formation professionnelle, la mission estime qu'il doit avant tout être clarifié. Nous proposons donc :

– de répartir différemment l'affectation de la contribution des entreprises au financement de leur plan de formation, une part de cette dernière devant alimenter un fonds régional de la formation tout au long de la vie. Il est essentiel de mutualiser des fonds pour cibler les actions de formation sur le public qui en a besoin au travers d'une véritable stratégie et d'une vraie politique de formation tout au long de la vie ;

– d'instaurer une subvention de l'État pour financer la démocratie sociale et de supprimer les subventions provenant des fonds de la formation professionnelle.

Enfin, l'un des objectifs essentiel de la réforme de la formation est de clarifier la gouvernance du système pour le rendre plus efficace et mieux le contrôler. La gouvernance doit d'abord découler d'une stratégie nationale ; à cette fin, un ministère de la formation tout au long de la vie doit être créé : le grand enjeu de société que représente la formation tout au long de la vie ne peut plus rester sans une politique nationale appuyée sur un pouvoir politique. La formation tout au long de la vie doit aussi être déclinée au plan territorial. L'échelon territorial, et plus particulièrement régional, nous est apparu comme le meilleur. Il s'agit donc de décliner la formation tout au long de la vie dans le cadre de comités régionaux rénovés, s'appuyant chacun sur un observatoire régional et, pour le financement, sur un fonds régional, dans le cadre d'une mutualisation des dotations provenant des entreprises, des participations de l'État – à travers un fonds national – des régions, des départements, et d'autres structures comme les organismes paritaires collecteurs agréés, les OPCA.

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