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Intervention de Sébastien Huyghe

Réunion du 24 mars 2010 à 21h30
Réforme du crédit à la consommation — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSébastien Huyghe :

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la popularité du crédit à la consommation, l'importante publicité qui en est faite et la situation économique dans laquelle nous nous trouvons actuellement ont conduit de nombreux Français à se placer en état de dépendance vis-à-vis de ce type de crédit, voire à se trouver dans une situation de surendettement.

En 2009, chaque mois, plus de 20 000 personnes ont déposé un dossier de surendettement auprès de la Banque de France. Cela représente, comparativement à l'année 2008, une augmentation de 14,8 % du nombre de dossiers. Parmi les personnes concernées par cette situation de détresse, 85 % avaient contracté au moins un crédit à la consommation. C'est dire toute l'importance qu'aura la future loi portant réforme du crédit la consommation dans la vie quotidienne de nos concitoyens, notamment parmi les plus fragiles.

Dans nos fonctions, nous avons tous, un jour ou l'autre, été confrontés à l'une de ces familles qui souscrivent un crédit à la consommation pour pouvoir s'en sortir ou vivre un peu mieux, et dont ils deviennent finalement les victimes. On peut comprendre l'attitude de certaines de ces personnes, qui se débattent dans d'importantes difficultés, alors qu'à grands renforts de publicité, des organismes de crédit leur promettent des sommes d'argent versables immédiatement et remboursables suivant des taux d'intérêt faussement bas.

Malgré cela, le crédit renouvelable a pris une place importante dans notre pays et, parallèlement, d'inévitables dérives sont apparues. Le harcèlement publicitaire, les commissions parfois excessives appliquées par les organismes prêteurs justifient notamment l'adoption de ce projet de loi.

Ces agissements, auxquels nous devons mettre fin, entraînent des pratiques de regroupement et de rachat de crédit qui aggravent les situations de surendettement. En s'attaquant à la racine du problème, nous limiterons ces dérives et réduirons, j'en suis persuadé, le nombre de ces ménages fragilisés par l'endettement.

Cette lutte est prioritaire. Afin de la mener en toute objectivité, dans le souci de réformer de la manière la plus profitable à nos concitoyens, il faut également garder à l'esprit l'importance du crédit à la consommation pour notre économie. Aujourd'hui, 34 % des ménages, soit 9 millions de personnes, ont recours à un crédit à la consommation. Pour une immense majorité d'entre eux, aucune défaillance n'interviendra dans leur remboursement. Les banques indiquent que le taux de défaillance ne représente pas plus de 2 % des crédits accordés. En ces temps de crise économique, le crédit est un moyen de faire vivre notre économie ; il est un moteur essentiel de la consommation. Le crédit à la consommation a aidé notre pays à maintenir, malgré le contexte de crise, le fonctionnement de certaines filières industrielles. Près de 40 % de la vente par correspondance s'appuient notamment sur ce type de crédit.

Je suis l'élu d'un département particulièrement sensible à cette problématique. Comme nous avons pu le rappeler durant l'examen de la proposition de loi visant à renforcer la protection des consommateurs en matière de vente à distance, la situation de ce secteur d'activité est particulièrement difficile, notamment dans le Nord. Certaines des entreprises qui sont implantées dans ce département, contraintes de composer avec la fin d'un modèle économique dans lequel elles ont autrefois prospéré, réalisent leur chiffre d'affaires grâce aux crédits à la consommation. Je veux donc mettre en garde contre les risques pour la survie des entreprises de ce secteur, donc pour les très nombreux emplois concernés – 30 000 dans le Nord – qu'induirait le vote d'un texte déséquilibré.

Au contraire, pour lutter contre les dérives, nous devons légiférer avec mesure et vision à long terme.

Dans cette perspective, le texte qui nous a été transmis par le Sénat me semble soucieux des intérêts tant des victimes des excès du crédit à la consommation que de notre économie et de notre industrie.

Le projet de loi que vous nous présentez aujourd'hui, madame la ministre de l'économie, permettra de garantir une distribution plus responsable du crédit et d'en finir avec les crédits renouvelables « pour toujours », qui ne comportent pas d'amortissement. Il mettra fin aux publicités agressives qui trompent le consommateur. Il clarifiera l'emploi de ces cartes confuses, qui sont adjointes à des cartes de fidélité ou de paiement. Il imposera également aux sociétés de financement de mieux s'informer sur la solvabilité de l'emprunteur. Surtout, le projet de loi aidera ceux qui ont connu des difficultés en limitant les délais d'inscription au fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers, le FICP, et en raccourcissant les procédures de surendettement.

L'examen de ce projet de loi nous donne l'occasion de mieux encadrer le crédit à la consommation. Il permettra d'en préserver les bienfaits pour notre économie et les ménages et d'en écarter les excès, les dérives et les principaux points noirs qui facilitent le surendettement.

Enfin, il nous faut réfléchir à long terme. Les débats, au Sénat comme au sein de la commission des affaires économiques saisie au fond, mais également dans la commission des lois saisie pour avis, se sont notamment focalisés sur la création d'un fichier positif.

Aujourd'hui, en toute illégalité, de nombreuses banques ont constitué leurs propres fichiers ; elles se les échangent même parfois entre elles. En 2009, dans plus de 80 % des dossiers de surendettement, six crédits à la consommation en moyenne avaient été contractés. Ne serait-il pas nécessaire de créer un fichier positif pour lutter contre cette flagrante réalité ? Lorsque nous traitons de ce sujet, l'opportunité de créer un fichier positif encadré revient toujours dans nos débats. Comme cela a été évoqué, la manière de consulter et de communiquer ce fichier pourrait être comparable à celle du permis à points ou du casier judiciaire : c'est le ménage qui y aurait accès et qui le communiquerait librement en vue d'obtenir un crédit à la consommation.

Le FICP est une première réponse. Cependant, je crois que nous sommes nombreux à considérer qu'il faudra, un jour ou l'autre, en venir au fichier positif.

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