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Intervention de Jean-Yves le Borgne

Réunion du 1er septembre 2010 à 9h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la république

Jean-Yves le Borgne, vice-bâtonnier de Paris :

Pour ma part, je soutiens le droit d'évocation. Nous ne sommes pas dans un système où la saisine d'une juridiction – qu'elle soit initiale ou supérieure – par une partie entraîne systématiquement l'examen du problème. Ce qui caractérise la procédure de la question prioritaire de constitutionnalité, c'est que la transmission est seulement possible. Or si, par exemple, une décision de la Cour de cassation de ne pas transmettre pouvait faire l'objet d'une procédure d'appel, nous serions dans un système où la transmission ne serait que facultative et liée à l'opportunité. Les Anglo-saxons ont sans doute des formules un peu lapidaires, mais entre le cherrypicking et le choix de la Cour de cassation, y a-t-il vraiment une différence ? Le principe est le même !

Ainsi, je pense que le Conseil constitutionnel aurait légitimité à déterminer si l'interprétation de la loi entre ou non dans le champ de son action. Si une loi peut être interprétée au point de lui faire dire ce que certains mauvais esprits considèrent comme le contraire de sa lettre, ce n'est pas parce que la loi est mauvaise, mais parce qu'elle est insuffisante et laisse une trop grande marge d'interprétation. Donc, l'évocation, c'est-à-dire l'appréciation par le Conseil constitutionnel du sérieux d'une question prioritaire de constitutionnalité n'ayant pas l'aval des juridictions têtes de file « inférieures » – ce dernier qualificatif m'a échappé –, pourrait être le moyen de mieux faire fonctionner le système de filtrage. Et si le Conseil constitutionnel, comme dans l'arrêt relatif à la garde à vue, continue à faire preuve de sagesse en se contentant d'indiquer pourquoi la norme existante est insuffisante ou contraire aux grands principes, sans pour autant dicter le contenu de la loi qui doit être adoptée en remplacement, nous resterons dans un système où les pouvoirs sont équilibrés. Le contrôle du Conseil constitutionnel ne s'exercerait pas sur le législateur – il lui laisse au contraire une vaste capacité d'invention – mais il pourrait le cas échéant s'exercer sur une interprétation abusive de la loi.

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