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Intervention de Michel Vaxès

Réunion du 25 mai 2011 à 21h30
Bioéthique — Article 23

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Vaxès :

Je peux encore rêver : peut-être mon intervention va-t-elle pousser certains collègues de la majorité à venir avec nous défendre ce que je considère comme une avancée.

Nous ne sommes pas les seuls à être partisans de l'autorisation et on trouve de nombreux exemples dans le rapport :

« Estimant que l'opportunité d'un régime dérogatoire n'avait plus de sens, le rapport au Premier ministre de M. Pierre-Louis Fagniez, député du Val-de-Marne, relatif aux cellules souches et choix éthiques avait déjà préconisé de passer à un régime d'autorisation des recherches sur l'embryon et les cellules souches. »

« De la même façon, l'Agence de la biomédecine, dans son bilan d'application de la loi de bioéthique du 6 août 2004 (octobre 2008), avait estimé qu'un régime d'autorisation pérenne, à condition qu'il soit aussi encadré que le régime actuel issu de la loi de 2004, présenterait les mêmes garanties en ce qui concerne le sérieux des recherches. »

Le 9 avril, dans son assemblée plénière, « le Conseil d'État avait également préconisé de mettre en place un régime d'autorisation des recherches sur l'embryon humain et les cellules embryonnaires ».

Selon l'Académie de médecine, « l'interdiction de principe de toute recherche sur l'embryon ne peut être justifiée par la protection d'embryons qui n'ont pas d'autre avenir que l'arrêt de leur vie ».

« Enfin, l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques s'était prononcé à deux reprises en faveur d'un régime d'autorisation des recherches sur l'embryon dans son rapport sur l'évaluation de l'application de la loi du 6 août 2004 relative à la bioéthique. »

Ce sont tout de même quelques avis autorisés, et vous n'aurez pas raison à l'échelle historique contre tous ceux qui sont convenus de la nécessité d'avancer.

Certains collègues nous ont dit que ces recherches n'avaient abouti à rien. C'est totalement faux. Le travail sur les cellules souches réalisé par l'I-stem, dans le cadre de l'INSERM, a permis une belle réussite française avec l'obtention d'une peau artificielle à partir d'une cellule souche embryonnaire humaine. Ce n'est pas vieux, c'était en 2009, et c'est une avancée considérable. Deux programmes d'essais cliniques sont déjà examinés par l'AFSSAPS pour des applications de thérapie cellulaire, l'une pour la peau et l'autre, proposée par le professeur Philippe Ménasché, pour le tissu cardiaque.

Autre assertion : les cellules induites à la pluripotence IPS seraient capables de remplacer les cellules souches embryonnaires. On s'aperçoit aujourd'hui que c'est faux. Il reste des traces des cellules initiales et ce matériau ne peut pas avoir la même utilité que la cellule souche embryonnaire.

Du point de vue de la thérapie, des démonstrations spectaculaires viennent d'être faites, comme celle de la validité de concepts de modélisation pathologique utilisant des cellules souches issues d'embryons atteints de la myotonie dystrophique de type 1. « Nos laboratoires ont réussi à identifier les mécanismes jusqu'alors inconnus de la maladie, qui crée des désordres chez les patients dans la communication entre le système nerveux et les muscles. En parallèle, nous avons utilisé les mêmes cellules embryonnaires porteuses de l'atteinte génétique responsable de la myotonie de Steinert pour réaliser des criblages de molécules à la recherche de composés dont l'administration aux patients contrecarrait les phénomènes pathologiques que les cellules souches nous permettent de reproduire en laboratoire. Nous avons effectivement identifié deux composés pharmacologiques qui présentent un tel pouvoir thérapeutique. »

C'est cela la réalité, et vous pouvez le vérifier parce que ce sont les comptes rendus des travaux d'un laboratoire publiés dans les plus prestigieuses revues de recherche internationales.

À quoi conduit cette incertitude, cette interdiction avec dérogations ? Ce n'est bien sûr pas la seule raison de s'y opposer, mais cela peut décourager des groupes d'investir dans notre pays. Ainsi, le laboratoire Roche, qui pouvait s'installer à proximité de notre centre de recherches à Paris, a choisi Bâle, parce que nous n'avons pas eu le courage d'affirmer qu'il fallait une autorisation sans conditions pour que ces investissements lourds pour des soins thérapeutiques puissent se faire, avec les conséquences que vous imaginez.

Je veux ajouter un autre argument, plus fondamental. On n'épuisera pas le débat aujourd'hui mais, lorsqu'on parle dans le rapport de respect de l'être humain, cela pose une vraie question : quand commence l'humanité ? Si l'on suit votre analyse, vous avez tué la vie tout à l'heure en refusant l'implantation post mortem. Pourquoi n'osez-vous pas faire le même choix maintenant ? Vous faites une différence entre un embryon avant transfert et un embryon après transfert. Un embryon avant transfert n'a pas de personnalité humaine.

Ce débat, je veux que nous l'ayons, probablement pas aujourd'hui parce que je note chez vous beaucoup de réticences à l'engager sur le fond. Mais, si vous persistez à mettre des obstacles à de telles avancées, les investissements se feront ailleurs, contre l'intérêt national, contre nos centres de recherche. Ce sera au détriment des perspectives d'améliorations sensibles des thérapies géniques, parce que vous aurez décidé de défendre des positions dogmatiques partisanes, et ce que je disais au début se confirme.

Je reprendrai la parole dans le débat en fonction des réponses que vous apporterez, mais prendre de telles positions, c'est empêcher les évolutions positives de la science au service des êtres humains.

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