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Intervention de Alain Juppé

Réunion du 19 octobre 2011 à 16h30
Commission des affaires étrangères

Alain Juppé, ministre d'état, ministre des affaires étrangères et européennes :

Monsieur de Charette, l'aspect « ésotérique » de l'APD, que vous soulignez, est l'une des choses qui m'ont le plus frappé lorsque j'ai pris mes fonctions et découvert le grand nombre d'intervenants de ce secteur. Des besoins nouveaux ont souvent donné lieu à la création de nouvelles structures, sans qu'il soit toujours procédé aux simplifications nécessaires : d'où la situation que vous décrivez. Soyez certain que je quitterai le ministère de la coopération sans que ce problème ait été résolu, avec beaucoup d'humilité et néanmoins quelque regret. Il est regrettable par ailleurs que l'aide publique au développement relève de nombreux programmes différents du fait que chaque ministère concerné a voulu conserver ses prérogatives.

Ma deuxième découverte, en arrivant au ministère, a été la complexité de ce secteur et la profusion des sigles et des jargons employés. L'articulation entre bilatéral et multilatéral diffère selon que l'on considère le total de l'aide publique au développement – soit 10 milliards d'euros – ou les 2,1 milliards d'euros du programme 209 dont il est ici question. Dans le premier cas, le rapport est de 40 % d'aide multilatérale pour 60 % d'aide bilatérale ; dans le deuxième, il est inverse, avec 35 % de bilatéral pour 65 % de multilatéral.

Parmi les grands pays émergents que sont la Chine, l'Indonésie, le Mexique, le Brésil, la Colombie, l'Inde et la Turquie, seuls la Chine et le Brésil contribuent à des politiques de développement.

L'aide publique française à la Corne de l'Afrique a été portée à 30 millions d'euros dans le cadre de l'aide multilatérale européenne ; notre aide bilatérale ainsi que la collecte organisée par diverses organisations caritatives auprès de nos compatriotes ont réuni 60 millions d'euros (30 et 30). Le total disponible et donc de 90 millions d'euros. La France a alloué cette assistance à la Croix-Rouge, à des ONG comme Action contre la faim, et au Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations unies. C'est une forme de sous-traitance.

L'idée avancée par M. de Charette de créer des normes européennes est très intéressante. Il y a en la matière beaucoup à faire, car les critères et les paramètres d'intervention varient d'un pays à l'autre. Ainsi, l'APD française comporte – on nous l'a souvent reproché – une part importante d'annulations de dettes, ce qui n'est pas le cas pour la Grande-Bretagne, d'où une différence d'un milliard d'euros entre les montants d'aide des deux pays. L'instauration de normes européennes demandera du temps et du travail, mais elle me semble être facteur d'efficacité. C'est la raison pour laquelle je m'attache à travailler en étroite collaboration avec le commissaire européen chargé du développement, M. Andris Piebalgs, homme remarquable et très ouvert. Nous avons ainsi mené une mission conjointe en Guinée-Conakry après l'arrivée au pouvoir du président Alpha Condé, afin de disposer d'un programme d'intervention complémentaire et, si possible, cohérent et allons renouveler cette opération d'ici quelques semaines à Madagascar, où il semble que la situation politique soit en voie de s'améliorer. Une fois la feuille de route signée, l'aide européenne pourra être remobilisée. M. Piebalgs et moi-même nous rendrons sur place et nous gagnerons beaucoup en efficacité à une opération commune – ce qui va dans le sens du souhait de cohérence et de transparence exprimé par Mme Martinez.

Sur le Burundi, je n'ai rien à ajouter à ce qu'a excellemment dit M. de Charette.

La France a toujours été favorable à la budgétisation du FED – qui du reste nous avantage sur le plan budgétaire – mais nos partenaires européens y sont encore majoritairement défavorables. La question se posera de nouveau lors de la prochaine discussion sur ce thème, qui aura lieu en 2020. Nous devrons être vigilants – je ne manquerai pas de l'être.

L'équilibre entre prêts et dons est ce qu'il est et l'on fait avec ce que l'on a. Le Royaume-Uni, du fait qu'il ne pratique pas l'annulation de dettes – qui pèse cette année un milliard d'euros dans notre budget –, dispose de plus de moyens que la France pour consentir des prêts et peut sembler intervenir plus vite et plus fort. Ainsi, dans la Corne de l'Afrique, alors que la France annonçait laborieusement une aide de 30 millions d'euros, le Royaume-Uni en annonçait 154 millions. Je serais évidemment favorable à ce que nous disposions de plus de possibilités de dons. Je répète que 60 % de notre aide est dirigée vers l'Afrique subsaharienne et 50 % vers les 14 pays déjà évoqués.

Madame Bousquet, il nous faut assumer la responsabilité du fait que le G20 n'ait pas inscrit la santé à son ordre du jour, mais je rappelle que ce sommet sera consacré au soutien à la croissance. Le Président de la République a voulu que cette réunion présidée par la France ne soit pas un catalogue « fourre-tout », mais qu'elle se concentre sur quelques points de manière à pouvoir déboucher sur des projets concrets.

Le Fonds de lutte contre le sida, qui recevait 300 millions d'euros, en recevra 60 millions de plus grâce à un prélèvement sur la taxe sur les billets d'avion. J'ai annoncé à Londres, au mois de juin, une participation de 100 millions d'euros au GAVI pour la période de 2011 à 2015. UNITAID reçoit 110 millions par an. Quant aux engagements pris à Muskoka, j'ai annoncé à Ouagadougou une contribution française de 100 millions par an pendant cinq ans.

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