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Intervention de Arnaud Richard

Réunion du 4 novembre 2011 à 10h00
Projet de loi de finances pour 2012 — Travail et emploi

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaArnaud Richard, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales pour l'emploi :

Les rapporteurs spéciaux ont déjà mis en lumière, avec beaucoup de talent et de précision, les grandes évolutions de la mission « Travail et emploi » pour 2012. Je me contenterai donc pour ma part de pointer les éléments sur lesquels la commission des affaires sociales a plus particulièrement débattu, ainsi que les principales conclusions des travaux que j'ai menés sur la territorialisation des politiques de l'emploi.

Comme j'ai eu l'occasion de le dire devant la commission des affaires sociales, face à la grave crise économique et financière que nous connaissons, la tâche du Gouvernement n'est pas aisée car sa détermination ne peut fléchir, tant en matière de lutte contre le chômage et de développement de l'emploi qu'en matière de maîtrise des déficits et de réduction de la dette publique.

Ceci explique en partie que les crédits de la mission « Travail et emploi » soient présentés en baisse de plus de 12 % pour 2012. Cette diminution résulte essentiellement de l'arrivée à échéance d'un certain nombre de dispositifs issus du plan de relance – et il faut, à cet égard, saluer de nouveau la clairvoyance et la réactivité dont a fait preuve le Gouvernement, en mettant en place ces mécanismes et en les dotant de moyens suffisants pour répondre à la grave crise qui menaçait notre économie.

Le sentiment qui domine malgré tout est que la crise est loin d'être derrière nous : la baisse importante des moyens consacrés aux politiques de l'emploi nous permettra-t-elle de disposer, l'an prochain, de marges de manoeuvre suffisantes pour répondre aux besoins des entreprises en difficulté, de demandeurs d'emploi plus nombreux et de territoires soumis aux restructurations ? Telle est la question que nous nous posons tous et à laquelle il est bien évidemment difficile de répondre aujourd'hui.

Le projet de loi de finances pour 2012 reconduit les moyens prévus dans la loi de finances initiale pour 2011 pour financer les contrats aidés et accroît l'effort en direction des publics fragiles, grâce notamment à une hausse des crédits visant à favoriser l'insertion professionnelle des personnes handicapées.

On constate en revanche une très forte contraction des crédits du programme 103 consacrés à l'accompagnement des mutations économiques, ainsi qu'un recul du financement des dispositifs de mesures d'âge – les allocations du Fonds national pour l'emploi et l'allocation équivalent retraite. À cet égard, madame la ministre, pouvez-vous nous préciser les intentions du Gouvernement concernant le financement de l'allocation transitoire de solidarité, dont la création a été annoncée début octobre ? Nous présenterez-vous un amendement abondant les crédits du programme 102 pour doter ce dispositif ?

Beaucoup d'interrogations ont également été soulevées lors de la réunion de notre commission sur le nouveau prélèvement de 300 millions d'euros opéré sur le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels. Les deux rapporteurs sur l'application de la loi du 24 novembre 2009 relative à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie, Gérard Cherpion et Jean-Patrick Gille, sont intervenus en commission pour s'inquiéter du risque que ce prélèvement pourrait faire peser sur le fonctionnement du dispositif mis en oeuvre par les partenaires sociaux. En effet, si on ne peut pas laisser dormir des fonds en période de contrainte budgétaire, comment cependant être certain que ce prélèvement n'obère pas la capacité d'intervention du fonds ? Pouvez-vous en outre nous préciser, madame la ministre, où en sont ses réalisations en termes d'accès à la formation des publics prioritaires ?

Pour les maisons de l'emploi, la commission des affaires sociales, comme d'ailleurs la commission des finances, a adopté à l'unanimité, sur ma proposition, un amendement abondant leur dotation à hauteur de 15 millions d'euros, alors que celle-ci est présentée en baisse de plus de 30 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2011. Il y a certes une grande diversité des maisons de l'emploi sur les territoires, mais la plupart des élus reconnaissent l'utilité de ces structures, en dépit de la nécessaire évolution de leurs missions résultant de la création de Pôle emploi.

Beaucoup d'interrogations demeurent néanmoins aujourd'hui sur le rôle qui leur est dévolu par le nouveau cahier des charges et sur les intentions du Gouvernement. De nouvelles diminutions de crédits étant désormais proposées tous les ans, les personnels sont inquiets pour leur avenir. La commission des affaires sociales estime à cet égard qu'il est nécessaire que le Gouvernement procède à une évaluation complète des maisons de l'emploi, analysant leurs performances respectives et leurs perspectives d'évolution, avant de décider de l'évolution de ces crédits. Pour ma part, je constate sur le territoire de Seine Aval que la maison de l'emploi fonctionne, et fonctionne même bien. Elle n'a pas été prise dans les filets des oppositions partisanes et c'est un outil de territorialisation des politiques de l'emploi efficace.

Enfin, la commission des affaires sociales s'est penchée sur l'emploi des jeunes, et en particulier des jeunes des quartiers prioritaires de la politique de la ville. Le rapport 2011 de l'ONZUS, remis avant-hier au Gouvernement, fait état d'une hausse de 12,3 % du chômage dans ces quartiers entre 2009 et 2010, alors que cette hausse n'était que de 4,4 % dans les entités urbaines environnantes ; la part des chômeurs atteint ainsi 14,5 % chez les 15-24 ans, contre 8,7 % dans les unités urbaines environnantes. Dernier chiffre extrêmement inquiétant, qui touchera certainement l'élu de la Croix de Metz comme celui de Longchamps, Hauts Champs ou du Haut du Lièvre, le chômage, dans ces quartiers, excède 20 % chez les 15-59 ans, soit le double de la moyenne nationale.

Or la commission des affaires sociales a noté que l'allocation CIVIS, qui fait partie du programme d'accompagnement renforcé du même nom mis en oeuvre par les missions locales, n'est plus calibrée sur 150 000 bénéficiaires potentiels comme l'an dernier, mais sur 135 000 : la somme qui lui est affectée, en baisse de 5 millions d'euros, bénéficiera donc à un plus petit nombre de jeunes ou se traduira par des montants distribués plus faibles. Cette allocation constitue pourtant un élément essentiel du contrat d'insertion dans la vie sociale, dans la mesure où elle permet de sécuriser financièrement les trajectoires d'insertion des jeunes qui en ont besoin. La commission des affaires sociales a donc adopté, à l'unanimité également, un amendement visant à abonder les crédits destinés à financer cette allocation à hauteur de 5 millions d'euros.

La commission s'est également intéressée aux autres instruments dédiés à l'insertion professionnelle des jeunes, et en particulier au contrat d'autonomie. Bien que décrié à ses débuts, tant pour des raisons de méthode que de résultats, ce dispositif semble néanmoins avoir porté ses fruits, du moins dans certains départements. Il n'en reste pas moins qu'il représente un coût très important pour les finances publiques, à rapporter à des taux de sortie positive qui ne sont pas supérieurs à ceux des dispositifs similaires, comme le CIVIS. Là aussi, la commission des affaires sociales souhaiterait pouvoir disposer au plus vite d'une évaluation du dispositif. À titre personnel, je pense que réduire ses crédits avant d'avoir cette évaluation ne serait pas du meilleur aloi.

Je souhaiterais enfin attirer votre attention sur certains aspects de la territorialisation des politiques de l'emploi. S'agissant de Pôle emploi, je crois que Xavier Bertrand a constaté la nécessité de donner plus de marges de manoeuvre aux directeurs territoriaux, aux directeurs d'agence et aux conseillers de Pôle emploi, afin d'adapter leur action aux publics qui en ont le plus besoin sur les territoires. Où en est cette réflexion sur la territorialisation et la déconcentration de Pôle emploi ? Dans quelle mesure sera-t-elle prise en compte dans le cadre de la nouvelle convention tripartite, actuellement en phase finale de négociation ?

Une partie de mon rapport pour avis est consacrée à la situation dans les zones urbaines sensibles : plusieurs études, produites par la DARES ou par l'IGAS, font aujourd'hui le constat d'un insuffisant ciblage des mesures de la politique de l'emploi dans ces zones, notamment s'agissant de l'accès des jeunes à l'alternance ou aux contrats aidés du secteur marchand.

Le comité interministériel des villes du 18 février 2011 avait fixé un certain nombre d'objectifs ambitieux et évoqué des pistes intéressantes, dont une plus grande territorialisation des politiques de l'emploi. Où en sont ses réalisations ?

Enfin, je considère que la territorialisation des politiques de l'emploi va bénéficier de la relance du service public de l'emploi local, que le Gouvernement a organisée cette année, madame la ministre, sous l'égide des sous-préfets. J'ai eu la chance d'assister à une réunion du service public de l'emploi local de Mantes-la-Jolie, durant laquelle était notamment examiné le plan d'action de ce SPEL. Avez-vous désormais connaissance du contenu de l'ensemble de ces plans d'action ? Ont-ils été analysés par vos services ? Quels enseignements peut-on d'ores et déjà en tirer ?

La commission ayant émis un avis favorable à l'adoption des crédits pour 2012 de la mission « Travail et emploi », je vous invite, mes chers collègues, à les approuver également.

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