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Intervention de Serge Janquin

Réunion du 7 novembre 2011 à 21h30
Projet de loi de finances pour 2012 — Aide publique au développement

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSerge Janquin :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'an dernier déjà notre rapporteure pour avis, Mme Martinez, avait assorti son rapport d'un avertissement cinglant relatif à l'information que le Gouvernement doit au Parlement, en notant qu'on ne pouvait délibérer que sur 35 % des crédits, dans l'attente des documents de politique transversale si tardifs et qui seuls permettent d'avoir une vue d'ensemble. Elle n'a malheureusement pas été entendue.

Cela est tout à fait insupportable. À l'égard de la rapporteure, dont chacun, en commission, loue la compétence, la hauteur de vues et la sincérité, le Gouvernement témoigne d'une incroyable inélégance – et encore, le mot est faible. Au-delà, c'est à l'égard des membres de la commission des affaires étrangères que vous marquez de la désinvolture, et plus largement la représentation nationale que vous tenez dans une forme de mépris en ne lui permettant pas d'exercer ses missions constitutionnelles. Enfin, au-delà du Parlement, ce sont tous les acteurs de l'aide publique au développement qui sont traités avec condescendance.

Comment avez-vous pu dire le 12 avril 2011, monsieur le ministre chargé de la coopération, qu'il convenait d'injecter « une dose de lisibilité et de visibilité pour tous dans la coopération française » ? Vous nous jouez du Pagnol, avec l'accent de Raimu – ou celui de Charles Pasqua, réputé connaisseur de ces questions : un petit tiers de visibilité et deux grands tiers d'invisibilité ! (Sourires.)

Pour exister, la lisibilité doit être totale. La sincérité d'un budget se mesure, non pas à la partie, mais au tout. On ne me fera pas croire que les moyens des ministères concernés, notamment ceux du ministère des affaires étrangères, ne permettent pas de faire face aux obligations. Ou alors ce serait accréditer la tribune, cosignée par MM. Védrine et Juppé, sur la situation des crédits du ministère ! Il est vrai qu'elle fut signée avant que M. Juppé en redevînt le titulaire…

Si les moyens sont là, vous n'empêcherez pas la suspicion d'une dissimulation, surtout s'agissant d'une politique qui a toujours été, à tort ou raison – chacun jugera – d'une réputation sulfureuse. Vraiment, il est temps, et plus que temps, que cela change. La manière dont ces crédits sont présentés – et sans doute votés – justifierait la censure constitutionnelle.

En ce qui concerne ce qui a été porté en temps utile à la connaissance de la représentation nationale, j'ai tout de même quelques questions à vous poser.

À la suite du rapport Camdessus de 2003, Financer l'eau pour tous, la France s'est engagée au titre de l'aide bilatérale, passant de 104 millions en 2001 à 559 millions en 2009. Mais force est de constater que la part des dons est passée de 48 % à 11 %, ce qui veut dire que le financement est essentiellement constitué de prêts, surtout en milieu urbain et dans des États solvables. Or les Objectifs du Millénaire pour le Développement insistaient sur les besoins de l'Afrique subsaharienne. Mme Martinez a bien tenté de me rassurer en précisant que c'est l'Afrique subsaharienne qui bénéficie le plus de dons ; soit. Mais comme les quatorze pays les moins avancés sont délaissés – l'aide globale privilégiant davantage les pays à revenu intermédiaire –, le compte n'y est quand même pas.

D'ailleurs, le choix préférentiel accordé aux pays à revenu intermédiaire pose un problème de définition : l'aide apportée aux entreprises françaises pour leur permettre d'exporter n'a rien d'inavouable. Doit-on pour autant la vêtir de lin blanc et la qualifier d'aide publique développement ?

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