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Intervention de Alban Caillemer du Ferrage

Réunion du 18 octobre 2011 à 9h00
Commission d'enquête sur les produits financiers à risque souscrits par les acteurs publics locaux

Alban Caillemer du Ferrage :

Cela s'explique par le mécanisme de couverture des banques. Quand un établissement de crédit se couvre d'un produit dérivé vendu à un client, il ne conclut pas une opération unique avec un intermédiaire ; il décompose en autant d'éléments de base traités sur les marchés de la manière la plus liquide possible les sous-éléments constituant le service qu'il a offert à son client. C'est pourquoi chaque élément de la couverture pris individuellement peut parfois paraître plus simple que l'opération globalisée vendue au client. Cela ne change rien sur le plan économique.

Quant à l'empilage des swaps, que la Cour des comptes qualifie de « fuite en avant », il est exclusivement le fait des opérations de restructuration et il est commandé par des impératifs économiques. Si les contrats ont été valablement conclus, il faut bien trouver une manière de payer les soultes dues, et pour cela restructurer les emprunts en faisant conclure à la collectivité considérée de nouvelles opérations fondées sur des sous-jacents moins risqués que les premiers mais dont la valeur d'acquisition est suffisante pour permettre à la collectivité de se défaire des prêts initiaux en vendant quelque chose de nouveau ; seuls les swaps le permettent.

Une des pistes à explorer serait de confier l'indexation ou le portefeuille de swaps à un acteur indépendant qui gérerait ces opérations de manière dynamique. Il est impératif que cela soit des produits dérivés, parce qu'on ne peut pas battre le mark-to-market, qui est la valeur économique objective sur laquelle se fait le consensus de marché. Si l'on veut l'indemniser, la payer ou l'amortir, il faut trouver d'autres produits qui permettent de le faire.

Pour répondre à la question de M. le rapporteur relative aux conséquences du classement des collectivités territoriales dans la clientèle « non professionnelle » au regard de la directive MiFID, à ma connaissance une seule disposition de notre droit interdit la vente de certains produits : c'est l'article 341-10 du code monétaire et financier qui exclut du démarchage « les produits dont le risque maximum n'est pas connu au moment de la souscription ou pour lesquels le risque de perte est supérieur au montant de l'apport financier initial ». Cela étant, le fait d'être ou de ne pas être un professionnel ne conditionne pas la capacité à conclure ; il conditionne en revanche la mise en cause de la responsabilité des prestataires de services d'investissement ou des prestataires bancaires, sans qu'il y ait là rien de spécifique aux collectivités territoriales. Par l'arrêt Buon rendu le 5 novembre 1991, la Cour de cassation a institué un devoir d'information sur les risques encourus qui prend en compte la sophistication du client et la complexité du produit. C'est sur ce terrain qu'il faut se placer pour apprécier la situation des collectivités territoriales, qui ne constituent pas un ensemble homogène : je ne pense pas que l'on ait tout à fait les mêmes interlocuteurs selon que l'on s'adresse à la commune de Saint-Barthélémy-d'Anjou citée dans le rapport de la Cour des comptes ou à la Région Ile-de-France. Selon les principes du droit français, on doit paramétrer ces obligations d'information. La jurisprudence est très claire à ce sujet : cela va d'une obligation d'information à un devoir de conseil et jusqu'à un devoir de mise en garde dans certaines situations. Une graduation s'impose en fonction de l'interlocuteur, et sans faire d'angélisme, car certaines collectivités territoriales sont de très gros acteurs très sophistiqués. Il faut donc faire preuve de beaucoup de pragmatisme.

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