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Intervention de Paul Giacobbi

Réunion du 18 janvier 2012 à 9h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Giacobbi, co-rapporteur :

Je tiens d'abord à avouer ma partialité pour ce qui est de l'Inde, étant probablement le seul parlementaire français à bénéficier du statut de « personne d'origine indienne ».

Les relations politiques franco-indiennes sont ancrées dans l'histoire. Dès son indépendance, l'Inde a pris une position de non-alignement qui se rapprochait de celle défendue alors en France par le Général de Gaulle. Mais les relations politiques bilatérales se sont surtout densifiées à partir de 1998, lorsque la France s'est abstenue de condamner l'Inde à la suite de ses essais nucléaires, puis s'est éloignée du Pakistan, mettant un terme à la parité entre les deux pays que la diplomatie française s'efforçait de respecter jusque là. Delhi et Paris ont lancé un partenariat et un dialogue stratégiques et la France a apporté son soutien à l'obtention par l'Inde d'un siège permanent au Conseil de sécurité des Nations unies. On a vraiment le sentiment que les relations politiques ne pourraient pas être meilleures, compte tenu des différences, notamment de taille, entre les deux pays.

Il n'en existe pas moins des désaccords ponctuels, comme sur la Libye et la Syrie, l'Inde s'opposant à toute intervention internationale dans un conflit interne. L'Inde n'est pas impérialiste, mais cela ne l'a pas empêché d'annexer le Sikkim, d'intervenir militairement au Sri Lanka ou d'exercer un quasi-protectorat sur le Népal et le Bhoutan… Il faut néanmoins reconnaître que ce type de velléités se limite à son environnement immédiat et que le pays ne se vit pas comme une puissance impériale, contrairement à la Chine qui a toujours eu pour ambition de soumettre tous les autres pays à son influence.

Nous partageons avec l'Inde des origines indo-européennes et surtout des valeurs démocratiques, dont je tiens à souligner qu'elles ne datent pas seulement de la colonisation britannique. L'institution du « Panchayat », conseil des cinq sages régissant les affaires communales, toujours en vigueur, remonte à des temps immémoriaux, tandis que le concept de la suprématie de la loi peut être datée du règne de l'empereur Ashoka, au IIIème siècle avant Jésus-Christ. Par ailleurs, pendant que la France connaissait les massacres de la Saint-Barthélémy, l'empereur Akbar instituait l'égalité des religions et l'égal accès aux emplois publics sans considération de la religion, permettant ainsi à l'un des ancêtres de Nehru, qui, d'évidence, n'était pas musulman, de devenir son Premier ministre. L'Inde est aujourd'hui une démocratie moderne, et même numérique, puisqu'elle met en pratique le vote électronique depuis une dizaine d'années.

Par rapport à la France, le Royaume-Uni dispose, dans ses relations avec l'Inde, d'un avantage linguistique, environ 5 % de la population indienne parlant couramment l'anglais, mais elle suscite aussi une vive hostilité, y compris de la part des élites qui ont étudié dans ses universités les plus prestigieuses, à cause du passé colonial, tandis que la France n'est pas perçue comme une puissance coloniale. Quant aux Etats-Unis, bien qu'ils accueillent plus de 100 000 étudiants indiens, ils apparaissent moins comme un allié que comme une puissance cherchant à soumettre ses partenaires. Ainsi, par exemple, la conclusion de l'accord franco-américain dans le domaine du nucléaire a été très contestée au sein de la classe politique indienne, y compris parmi les membres du parti du Congrès, alors que le même accord conclu avec la France n'a pas suscité de réactions d'hostilité.

L'Inde a besoin d'alliés politiques en Occident et la France d'un partenaire émergent. Le potentiel de l'Inde est immense : d'ici trente ans, elle aura le 3ème PIB mondial en parité de pouvoir d'achat ; c'est une grande démocratie, qui peut compter sur une diaspora qui lui sert de relais à travers le monde : au Royaume-Uni, bien sûr, mais aussi en Afrique de l'Est et du Sud, et en Amérique du Nord. La France a donc tout à gagner à développer et approfondir ses relations avec elle.

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