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Intervention de Jean-Claude Sandrier

Réunion du 7 février 2008 à 15h00
Ratification du traité de lisbonne — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Claude Sandrier :

C'est un événement exceptionnel : l'Assemblée nationale élue selon un mode de scrutin aujourd'hui discuté va censurer le peuple français ! Cet acte de défiance a été traduit par cette phrase prononcée ici même le 11 décembre dernier par M. Kouchner : « Quant au bien-fondé d'un référendum, il y en a déjà eu un, on a vu le résultat ! » Ces propos indignes traduisent bien la volonté du Président de la République d'empêcher que des Français ne votent à nouveau sur un texte similaire au précédent.

Ainsi, non seulement le Gouvernement de la France marque sa défiance envers le peuple mais, pour tenter de se justifier, il ment aux Français car ce texte est bien fondamentalement le même que celui qui a été rejeté le 29 mai 2005. Il suffit pour s'en convaincre d'écouter les principaux responsables politiques européens : Angela Merkel, qui considère que « la substance de la Constitution est maintenue », M. Zapatero que « nous n'avons abandonné aucun point important » et le Premier ministre du Danemark que « ce qui est bien, c'est que des éléments symboliques aient été retirés et que ce qui a réellement de l'importance, le coeur, soit resté ». Enfin, pour le père de la Constitution européenne, M. Giscard d'Estaing, « ce texte est en fait le retour d'une grande partie de la substance du traité constitutionnel ».

Dire que 53 % des Français, en votant pour le candidat Sarkozy et ses deux cents propositions auraient accepté de renoncer au référendum est un argument grotesque. D'ailleurs, à quel Nicolas Sarkozy faut-il se fier ? À celui qui, le 9 mai 2004 déclarait : « A chaque grande étape de l'intégration européenne, il faut solliciter l'avis du peuple », à celui qui a dit qu'il serait le président du pouvoir d'achat ou à celui qui renie ses discours ?

Ces choix politiques sont graves pour la crédibilité des responsables politiques, pour la démocratie.

Mais il y a peut-être plus grave encore : en refusant à nos concitoyens de se prononcer sur la construction européenne, c'est en fait celle-ci que vous condamnez. Imposer une Europe sans l'avis des peuples directement consultés par référendum, c'est imposer une Europe sans les peuples, voire contre les peuples. C'est donc une Europe sans avenir.

Pourtant, plusieurs signes ont été envoyés, notamment par les peuples français et néerlandais, mais pas seulement. Ces signes auraient pu, auraient dû vous alerter sur le manque de soutien, la méfiance pour ne pas dire plus à l'égard de cette Europe dominée par un monde financier irresponsable et que vous voulez imposer à tout prix.

Lundi, à Versailles, le Premier ministre s'en prenait à ceux qui allaient voter non, les accusant de ne pas vouloir relancer l'Europe. C'est une belle façon d'esquiver la seule question qui compte : relancer l'Europe, oui, mais laquelle ? Une Europe de progrès social ? Mais alors, ce n'est pas l'Europe du dumping social et des paradis fiscaux. Une Europe de la coopération ? Mais alors ce n'est pas l'Europe de la concurrence libre et non faussée. Une Europe de l'égalité ? Mais alors ce n'est pas l'Europe des services publics soumis aux règles de la concurrence. Une Europe de l'indépendance ? Mais alors ce n'est pas celle de la soumission à l'OTAN. Une Europe dans laquelle le travail serait mieux rémunéré que le capital ? Mais alors ce n'est pas celle de la poursuite du renforcement de la libre circulation des capitaux. Cette Europe ultracapitaliste, on sait ce qu'elle signifie pour la France : pouvoir d'achat en baisse pour la majorité de nos concitoyens et pression sur les salaires, recul social généralisé sur les retraites, la sécurité sociale, le droit au travail, la multiplication des délocalisations, le développement de la précarité et des inégalités.

Vous construisez l'Europe du fric pour promouvoir la France du fric, celle de l'argent qui rend fou, selon l'expression d'un prix Nobel d'économie.

Parce que nous voulons une autre France, celle de l'égalité, de la solidarité, de la liberté, nous voulons une autre Europe, une Europe sociale, celle d'une juste répartition des richesses, garantie d'une Europe de paix durable. C'est pourquoi les élus communistes et républicains voteront contre la ratification du traité de Lisbonne. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

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