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Intervention de Patrick Beaudouin

Réunion du 28 novembre 2007 à 15h00
Protection des personnes contre les chiens dangereux — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Beaudouin :

Une série d'événements tragiques, dus à des agressions par des chiens visant notamment de jeunes enfants, ont provoqué une vive réaction de l'opinion.

Ces accidents ont montré que, bien qu'elle soit récente et qu'elle ait été perfectionnée à plusieurs reprises, la législation était insuffisante pour rendre compte de la notion d'animal dangereux et qu'elle était, de plus, rarement appliquée.

Les questions non résolues étaient nombreuses sinon difficiles à résoudre : difficulté du classement des animaux, manque de contrôle et de formation des maîtres ou des détenteurs des animaux, identification difficile et non responsabilité des éleveurs ou des détenteurs de nombreux chiens, insuffisance des sanctions, absence de pouvoirs des autorités locales…

Devant l'ampleur du problème, moi-même et un certain nombre de mes collègues avons déposé des propositions de lois tendant à réformer la législation. Le député de Vincennes que je suis reçoit de plein fouet les plaintes quotidiennes et nombreuses des utilisateurs du bois de Vincennes qui souhaiteraient vivre cet espace vert sereinement et ne plus y croiser des animaux qui, en raison de l'irresponsabilité de leurs maîtres, sont devenus des dangers permanents.

Je suis donc personnellement très heureux, madame le ministre de l'intérieur, que vous ayez déposé le présent projet de loi que nous discutons aujourd'hui après qu'il eut été adopté par le Sénat, où des amendements d'origine parlementaires ont été adoptés.

Un grand pas a déjà été accompli dans la mise en place d'une véritable réglementation de l'ensemble des conditions de détention des chiens qui peuvent être dangereux. Les travaux de la commission des affaires économiques sur le rapport précis et détaillé de notre collègue Catherine Vautrin ont encore précisé les règles qui vont s'appliquer.

Trois points me paraissent particulièrement importants dans ce débat.

Le premier aspect est relatif à l'identification des chiens qui peuvent être potentiellement dangereux par nature ou qui peuvent l'être occasionnellement – et, dans ce cas, tous les chiens sont concernés.

J'aurais souhaité que la classification entre chiens d'attaque et chiens de défense soit renforcée, voire élargie. Cependant, j'admets qu'elle subsiste si elle est complétée, comme le prévoit la loi, par un système d'évaluation individuelle des animaux permettant de détecter, à tout moment, la dangerosité d'un chien quelle que soit sa race. Les mesures proposées – évaluation, identification des incidents, création d'un organisme centralisant les informations – me semblent suffisantes.

Un deuxième point, plus important encore, concerne l'élaboration d'un véritable statut des détenteurs ou des propriétaires de chien potentiellement dangereux ainsi que des éleveurs d'animaux. La loi crée, à juste titre, l'obligation, pour le propriétaire ou le détenteur de chien de première ou de deuxième catégorie de recevoir une attestation d'aptitude sanctionnée par un certificat qui, seul, donne droit à la possession de l'animal. Cela répond, en partie à mon souhait de créer un permis canin, ce qui sera fait, je l'espère, par voie d'amendement.

Permettez-moi de rappeler les mots précis utilisés par le législateur ici même pour définir ces deux catégories de chiens dits dangereux : il parlait des chiens de « combat » ou d'« attaque », et des chiens de « garde » ou de « défense ». Ces mots ne sont pas neutres et ne décrivent pas une simple, bonne et douce compagnie. Le maître de tels chiens, qui peuvent être considérés comme armes par destination, doit être obligatoirement formé pour apprendre à maîtriser le comportement de son animal, et les règles de vie à faire respecter en privé ou en public doivent impérativement lui être rappelées.

Il est important que les responsables sur le terrain, les responsables de proximité, les maires, les présidents de communautés, les préfets mettent en oeuvre ce dispositif, car ils sont au contact de la réalité du problème.

Troisième point : la loi organise la reproduction et l'élevage des chiens en les plaçant sous la tutelle des autorités préfectorales. C'est la consécration d'initiatives déjà prises. Il faut insister pour que cette réglementation mette fin aux élevages clandestins parallèles et au commerce, souvent illégal, des animaux.

Enfin, pour être efficace, les dispositions répressives doivent être sévères, sans quoi le marché noir des animaux pouvant être dangereux risque de proliférer.

Il faut également être vigilant sur l'utilisation malsaine et abusive, voire inhumaine, des chiens de première et de deuxième catégorie par des soi-disant maîtres-chiens de sécurité ou d'autres sociétés de ce type. L'article reportage du Figaro d'aujourd'hui en témoigne de façon tragique et attristante.

Ce projet de loi, modifié par le Sénat, me satisfait tel qu'il est complété par les amendements adoptés par la commission des affaires économiques. Il propose une vision réaliste du problème général de la détention des chiens, qui sont les meilleurs compagnons de beaucoup de nos concitoyens.

Il propose un juste équilibre entre la réalité et un angélisme qui voudrait que l'animal soit bon par nature et qu'il ne puisse pas être soupçonné de violence.

Je souhaite, madame la ministre, qu'une large campagne de communication et de sensibilisation soit menée et mobilise tous les acteurs potentiels : éleveurs professionnels, vétérinaires, professionnels canins, associations protectrices des animaux, élus locaux, médias ou acteurs institutionnels – je pense aux spécialistes de la police nationale ou de la gendarmerie. Cette campagne aurait pour cible tous les propriétaires d'animaux de compagnie et porterait sur leur responsabilité sachant que tout animal peut avoir un comportement impulsif. Il faut en effet mettre fin à l'inconscience coupable ou à la naïveté cruelle dont font preuve nombre de propriétaires de chiens.

Je voudrais rappeler l'excellente initiative de l'ancien ministre de l'agriculture, Hervé Gaymard, qui, en 2004, avec l'ensemble des professionnels canins avait permis la rédaction d'un Livre de responsabilisation pour le propriétaire d'un animal de compagnie. Je vous en ai apporté un exemplaire.

Toutefois, madame la ministre, vous me permettrez de penser qu'il sera tout de même nécessaire d'aller plus loin. L'expérience que je tire du forum de l'animal de compagnie que j'organise chaque année dans ma ville de Saint-Mandé me fait témoigner que beaucoup de nos concitoyens pèchent par défaut vis-à-vis du monde animal.

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